Avril
2000
L'action
DrKoop est tombée à 2,5 dollars
début avril 2000
Gaëlle
LAYANI
26 avril
2000
La
correction des valeurs Internet a fait quelques victimes parmi les
start-up du Net médical américain. L'une des plus belles chutes
a été enregistrée par DrKoop : introduite autour de 20 dollars,
l'action du portail santé grand public était rapidement montée à
40 dollars pour ensuite rapidement dégringoler à 2,5 dollars
début avril.
Ces déboires boursiers
menacent sérieusement la survie de l'ancienne valeur montante du
"e-health". Cette chute fait suite à l'annonce par les
commissaires aux comptes de la société que DrKoop n'a plus les liquidités
nécessaires pour poursuivre ses activités au-delà des douze prochains
mois. Ceux-ci ont également insisté sur l'absence de rentabilité
du portail.
Les difficultés de
DrKoop ne sont pas uniquement le fait d'investisseurs et d'actionnaires
grégaires, prompts à brûler ce que naguère ils adoraient. La société
a en effet des allures de colosse aux pieds d'argile. Tributaire
du cours de ses actions, elle risque de retrouver en cessation de
paiement, car elle ne peut plus procéder à des augmentations de
capital pour financer ses activités. De plus, l'enthousiasme des
investisseurs tend à s'émousser quand les profits se font attendre.
Evolution du cours
de l'action DrKoop sur 10 mois
L'image de DrKoop a
également été écornée par un rapport de la California Healthcare
Foundation qui met en lumière les graves manquements des portails
santé à la confidentialité des données. Parmi les sites incriminés,
DrKoop qui fait notamment un usage abusif des cookies (lire notre
article à ce sujet : Les
sites américains de santé en ligne
de mire des défenseurs de
la vie privée). Le visiteur est en outre amené à laisser des
données personnelles sur le site alors même qu'il n'a pas obtenu
les renseignements demandés (lire notre article : Recrutement
des patients en ligne & confidentialité des données).
Or, DrKoop, à l'instar
des autres start-up du Net, a consacré beaucoup de temps et d'argent
à imposer sa marque. Les sommes levées en Bourse sont souvent englouties
dans les budgets publicitaires et marketing. Car la concurrence
est rude sur le marché du e-health. Healtheon/WebMD ambitionne de
devenir l'acteur incontournable de la santé électronique aux Etats-Unis
via une politique de fusions-acquisitions tous azimuts. Le 16 février 2000,
le numéro un des sites dinformations sur la santé OnHealth
Network Co. entrait à son tableau de chasse pour 313 millions de
dollars.
A cet égard, Healtheon/WebMD
est emblématique de la frénésie des fusions-acquisitions dans le
secteur de la "Net economy". Leur nombre a augmenté de
700 % entre 1998 et 1999 (lire
le Chiffre du mois de mars 2000). Le phagocytage permet aux
start-up de grossir et partant de consolider leur marque et leur
assise sur le marché. Jusqu'à récemment, le NASDAQ récompensait
les stratégies hégémoniques en valorisant les acheteurs. Dotées
de capitalisations phénoménales, les start-up pouvaient acquérir
d'autres start-up, voire de vénérables sociétés traditionnelles
(cf. le rachat de Time Warner par AOL).
La correction boursière
annonce-t-elle alors l'essoufflement des fusions-acquisitions sur
le Web ? C'est peu probable. En revanche, les montants et les
auteurs des transactions pourraient bien changer. En effet, jusqu'alors
les sociétés de la "Net economy" occupaient le devant
de la scène : 70 % des acquéreurs étaient des start-up.
La chute des cours affectant leur pouvoir d'achat, le rythme des
fusions-acquisitions par les firmes Internet devrait ralentir. Les
médias traditionnels, les sociétés de télécommunication et de divertissement
feront alors réellement leur entrée sur le marché. Les vendeurs
devront également revoir leurs prix à la baisse. Ainsi, les sociétés
les plus en difficulté, notamment celles opérant sur le marché du
commerce Business-to-Consumer, seront vraisemblablement amenées
à brader leurs actifs.
La réussite appartient
aux opérateurs mixtes, intégrés dans le système de santé, et proposant
de vrais services, susceptibles d'être solvabilisés. Les portails
généralistes ne peuvent plus miser sur la seule cible grand public
et leur notoriété pour espérer faire des bénéfices, notamment à
coup de rentrées publicitaires et d'alliances pour la production
de contenus. Elles doivent envisager l'internaute comme un patient
et un assuré social, avide d'informations mais également d'applications
innovantes : gestion du dossier médical et de la police d'assurance
maladie en ligne, guide des hôpitaux, etc. Healtheon/WebMD, qui
se présente comme un réseau connectant les acteurs du monde de la
santé et les "consommateurs", l'a bien compris.
Le titre DrKoop n'aura
pourtant pas mis longtemps à se relever. Fin avril, le titre a gagné
100 % à l'annonce d'une renégociation du partenariat avec AOL
! Question : combien de temps cette hausse lui permettra-t-elle
de garder la tête hors de l'eau ?
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26
avril 2000
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