Les
dons d’organes sur le net
Nathalie
BESLAY,
Avocat au Barreau de Paris
19
février 2001
L’environnement légal et éthique
La base de données nationales des refus : un
accès restreint
Promotion
en ligne du don d’organes
L’environnement légal et
éthique
Le
régime juridique applicable aux transplantations d’organes a longtemps
été paralysé par le sacro-saint principe de l’indisponibilité du
corps humain. Le dispositif légal actuel est issu des lois bioéthiques
de 1994 (Loi 94-654 du 29 juillet 1994) qui a réformé les règles
applicables aux transplantations d’organes. Il a érigé les principes
éthiques fondamentaux qui encadrent la transplantation d’organes :
-
le consentement du donneur et du receveur,
- la gratuité
du don,
- l’anonymat
donneur/receveur dans le cas d’un don d’organe d’un défunt,
- l’interdiction
de la publicité.
Dans
le cas d’un prélèvement d’organe sur personne décédée, la France
a opté pour la présomption de consentement. Cependant celle-ci
peut être renversée, soit par l’inscription du donneur durant
son vivant sur le Registre national des refus, qui est une base
de données constituée et gérée par l’Etablissement Français des
Greffes (EFG), soit par le témoignage de la famille ou des proches
du défunt.
La base de données nationales
des refus : un accès restreint
En
l’état, le Registre national automatisé des refus tenu par l’EFG
n’est pas accessible directement ni par les particuliers, ni même
par les professionnels de santé concernés par les transplantations
d’organes . En effet, les impératifs de préservation de la
vie privée (Article 9 du Code Civil) et de protection des données
personnelles (Loi 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique,
aux fichiers et aux libertés ) ont conduit le législateur à rendre
le fichier inaccessible.
Toutefois,
une procédure a été mise en œuvre par l’EFG afin de permettre de
gérer les interrogations systématiques et préalables du fichier.
Chaque fois qu’un prélèvement d’organe sur une personne décédée
est envisagé, les médecins s’adressent directement à l’Etablissement
Français des Greffes dont un service se charge de consulter le Registre
et de restituer l’information de l’existence ou non, d’un refus
formalisé par le donneur décédé du temps de son vivant.
A priori,
la mise en ligne de la base de données avec accès sécurisé et restreint
aux seuls établissements autorisés à pratiquer des prélèvements
d’organes, n’est pas prévue par l’EFG. Les arguments évoqués par
les autorités s’attachent au caractère très sensible des données
personnelles ainsi traitées, et aux risques d’atteinte à l’intégrité
et à la confidentialité de la base de données.
Aux
Etats-Unis, plusieurs Etats ont réformé leur législation qui prévoyait
que le consentement au don d’organes était formalisé au sein des
cartes d’identité ou sur les permis de conduire. Désormais, ce fichier
est directement accessible en ligne (la base de données initiale
a été reprise) et peut être enrichi, en ligne par les personnes
souhaitant déclarer leur volonté de donner, durant leur vivant.
(par exemple www.coloradodonorregistry.org
). Les motifs avancés de la réforme tiennent à l’impossibilité matérielle
récurrente de consulter les cartes d’identité et les permis de conduire
des personnes décédées.
Il convient
de noter que si en France le Registre National est une base de données
listant les refus, au contraire aux Etats Unis, il s’agit d’un inventaire
des consentements des donneurs. Voilà peut-être la différence majeure
qui justifie l’inaccessibilité directe à ce fichier, dans notre
société où le refus d’un don pourrait être assimilé, par un raccourci
culturel, à un manquement à la solidarité sociale.
Or le consentement
au don d’organe relève du cœur du cœur de la vie privée et chacun
doit être libre de refuser ce don, dans le secret. Telle est l’option
retenue par le législateur français.
Il
n’en reste pas moins que d’autres acteurs de la chaîne de la transplantation
en France pourraient être intéressés, dans le cadre de sites web,
à jouer un rôle moteur ou relais, éthiquement acceptable, dans la
promotion du don d’organes. Il n’est qu’à visiter le site Tansplantation
de Novartis. La question des règles encadrant la promotion et l’information
on line sur le don d’organes est donc posée.
Suite
et fin (2/2)
19 février 2001
|