La
circulation des malades en Europe
est-elle "juridiquement" correcte ?
Nathalie
Beslay et Julie
Gabinski
Alain
Bensoussan - Avocats
12
juillet 2002
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A
ce titre, l’article 60 n’exige pas que le service soit payé par
ceux qui en bénéficient ; en outre, l’article 60 du Traité
s’applique aux prestations fournies contre rémunération définie
comme une contrepartie économique de la prestation en cause. Dans
cette affaire, les paiements effectués par les caisses de Sécurité
sociale constituent une contrepartie économique des prestations
hospitalières et présentent un caractère rémunératoire de l’établissement
hospitalier. Ces éléments permettent à la CJCE d’affirmer que la
libre prestation des services au sens des articles 59 et 60 du Traité
de Rome est assurée, sous réserve de restrictions justifiées. En
effet, le Traité de Rome et la jurisprudence de la Cour de justice
des Communautés Européennes admettent l’existence de restrictions
à la liberté de prestations des services, lorsqu’elles sont justifiées
pour des raisons impérieuses d’intérêt général, notamment de santé
publique. A ce titre, un ressortissant européen qui se déplace dans
un Etat membre de l’Union européenne pour se faire soigner, pourrait
être confronté au refus par un établissement hospitalier de fournir
des prestations de santé. Toutefois, la liberté de circulation des
malades en Europe n'est pas totalement opérationnelle.
Comment
le malade migrant est-il remboursé ?
En
France, l'assuré paie directement les soins qu’il reçoit ;
il a ensuite la possibilité de se faire rembourser une partie des
frais engagés par sa caisse d’assurance maladie. Il peut dans certains
cas être dispensé de l’avance des frais, en vertu de conventions
de tiers-payant qui permettent de payer directement le praticien
ou l’établissement de soins concerné. Si M. Martin, résidant en
France, décide de se faire soigner en Italie, sera-t-il remboursé
selon les modalités de la loi française ? En principe, le principe
de territorialité s'applique : un malade ne peut prétendre
obtenir le remboursement des prestations de santé que dans la mesure
où il réside sur le territoire français et qu'il dispose de la qualité
d'affilié. En conséquence, en vertu de ce principe, M. Martin, ne
pourra pas obtenir de prestations d’assurance maladie.
Cependant,
les caisses peuvent procéder au remboursement des soins sur une
base forfaitaire. En effet, l’assuré français qui se déplace, par
exemple en Italie, pourra bénéficier de remboursements sur présentation
d’un formulaire spécial délivré par la Caisse Primaire d’Assurance
Maladie, à savoir le fameux formulaire E 111 pour les soins
inopinés, et le formulaire E 112 pour des soins impossibles
à obtenir en France. Toutefois, la CPAM pourra refuser de délivrer
le formulaire E 111 si elle estime que le déplacement du malade
dans un autre Etat, risque de compromettre son état de santé. En
procédant ainsi, la CPAM procède alors à un contrôle indirect des
dépenses de santé.
Vers
une unicité des systèmes de santé ?
Par
conséquent si la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés
Européennes ne permet pas d'affirmer l'existence d'une harmonisation
du système de remboursement de prestations d'assurance maladie,
elle contribue à l’édification d’un début d’harmonisation.
Un
arrêt de la Cour de cassation a confirmé ce principe le 28 mars
2002. La Cour a considéré qu’il revient à la Caisse Primaire d’Assurance
Maladie de l’assuré de prendre en charge les frais de soins engagés
par celui-ci dans un autre Etat membre de la Communauté européenne,
en fonction du tarif en vigueur appliqué dans l’Etat d’affiliation
du malade. La Caisse Primaire d’Assurance Maladie est soumise
à cette obligation, quand bien même l’Etat membre, dans lequel l’assuré
a reçu les soins, n’assure aucune prise en charge des frais médicaux.
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