Les
RMO sont utiles,
leur renforcement est nécessaire
Hervé
NABARETTE
Les Références Médicales
Opposables (RMO) sont devenues un élément essentiel du cadre juridique
qui régit lactivité des médecins.
Elles ont été rendues opposables par la loi du 4 janvier 1993 relative
aux relations entre les professionnels de santé et lassurance
maladie (lopposabilité est une spécificité française). Leur
première application débute avec la convention médicale du 21 octobre
1993 (cette dernière liait dailleurs les RMO à la création
dun dossier médical informatisé et au codage des actes). Lordonnance
du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses
de soins a complété la loi de 1993 en comblant le vide juridique
qui pouvait exister en cas dabsence davenant à la convention
médicale : dans ce cas, un arrêté ministériel détermine les
références rendues opposables après consultation des caisses nationales
et des syndicats de médecins.
Les références sont
conçues comme des outils daide à la décision destinés à écarter
des choix diagnostiques ou thérapeutiques inutiles ou dangereux.
A ce titre, elles servent la maîtrise des dépenses de santé, lamélioration
de la pratique médicale et la protection de la santé publique.
On a observé un impact
limité mais réel sur lévolution des prescriptions. A cet égard,
lexistence dune RMO ne suffit pas en elle-même :
lexamen de la pratique des médecins doit déboucher sur des
actions spécifiques telles que lentretien, la lettre de rappel
et le contentieux comme recours ultime pour les médecins récalcitrants.
De façon générale, comme le remarque la Cour des Comptes dans son
rapport sur la sécurité sociale (septembre 1997), lexistence
même des RMO conduit le monde médical à se familiariser avec lutilisation
de recommandations jusque là absentes du système de santé français.
La Cour souligne cependant certaines limites importantes du fonctionnement
actuel des RMO.
Concernant le processus
délaboration des références, la sélection des thèmes de
recommandations reste le produit dune négociation entre les
parties signataires de la convention. Or les caisses assignent
aux RMO des objectifs de maîtrise de dépenses, tandis que les représentants
des syndicats tentent den limiter les effets sur les revenus
des praticiens. Dautre part, les partenaires conventionnels
présentent des thèmes sans avoir pu procéder, faute notamment de
codage, à des études dimpact sur les dépenses et la qualité
des soins. Comme le souligne la Cour, cette procédure conduit par
conséquent à une multiplicité de références dont limpact sur
les pratiques médicales et les dépenses de soins présentées à lassurance
maladie est très inégal. En réalité, seul un petit nombre de références
concentrent facilité de contrôle, fréquences des irrégularités,
coût financier et médical important.
En second lieu, il apparaît
que les RMO sont insuffisamment contrôlées. Certes, leurs
caractéristiques mêmes (notamment leur formulation négative) et
les difficultés du codage constituent des obstacles sérieux à un
encadrement global des actes et des prescriptions. Mais la Cour
relève aussi le faible nombre de sanctions prononcées. En 1995 et
1996, la proportion finale des médecins examinés ayant fait lobjet
de sanctions financières sans sursis nest que de 0,59% (soit
une centaine de médecins sur 20 000 contrôlés, alors quenviron
500 avaient dépassé des seuils dopposabilité considérés comme
relativement élevés). Dautre part, les inégalités de traitement
entre Comités Médicaux Paritaires Locaux, qui statuent en première
instance, apparaissent flagrantes.
La Cour mise donc sur
certaines innovations récentes, même sil est encore
trop tôt pour mesurer leurs effets :
-
rôle nouveau de lAgence
Nationale dAccréditation et dEvaluation en Santé
et de lAgence du médicament qui écrivent elles-mêmes les
nouvelles références
-
convention de mars
1997 qui réduit le nombre minimal de cas de non respect requis
pour lopposabilité
-
codage progressif
en pharmacie
-
mise en place des
comités médicaux régionaux, mieux armés que les CMPL.
Au-delà, la Cour
prône la simplification et le recentrage. Il est indispensable
de formuler les références de manière à les rendre réellement contrôlables
et de les cibler sur les domaines prioritaires en termes de qualité
des soins et dimpact financier. En effet, il apparaît que
les enjeux financiers sont concentrés sur un petit nombre de références
(par exemple les références sur lutilisation des antibiotiques
et des anti-inflammatoires pour les infections courantes des sphères
ORL et respiratoires permettrait à elles seules une économie supérieure
à 250 millions de francs selon une étude du IRDES de mars 1996 :
" les RMO, impact sur la prescription pharmaceutique ").
Les dispositions de lordonnance
du 24 avril 1996 et des conventions approuvées le 28 mars 1997 qui
disposent que le respect des RMO fait partie des critères susceptibles
dêtre utilisés pour individualiser la charge des éventuels
reversements selon les médecins pourraient trouver là les conditions
de leur effectivité.
Les RMO devraient aussi
mieux sinsérer parmi les recommandations arrêtées par
lANAES qui seront utilisées pour laccréditation des
établissements des établissements hospitaliers et les missions dévaluation
effectuées par les unions de médecins libéraux.
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