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Chaînage des informations :
vers une solution ?

Hervé Nabarette

20 septembre 2001

Le chaînage permet de regrouper les informations portant sur un patient pris en charge à deux endroits différents (deux cabinets médicaux, deux établissements...) ou d’un patient pris en charge dans un même établissement lors de plusieurs séjours. Il autorise donc le suivi des prises en charge. Dans leur exercice, les médecins concentrent les informations concernant leurs patients, à travers la tenue du dossier médical. Mais il est rare qu’ils disposent d’une vue exhaustive des événements et des prises en charge. Si l’on quitte l’information liée à la "production de soins" (tenue du dossier, transferts de données médicales entre professionnels de santé...) pour considérer l’utilisation par les épidémiologistes et les économistes des bases de données, on constate qu’il n’existe pas à ce jour de chaînage systématique des informations médicales. Dans ce contexte, la mise en place du PMSI chaînable revêt toute son importance.

 L’utilité du chaînage et son absence

L’absence de chaînage est dommageable pour les études épidémiologiques et médico-économiques. Lorsque l’on souhaite dénombrer les malades atteints d’une pathologie, les bases de données peuvent contenir des "doublons" (c’est-à-dire qu’une même personne est comptée deux fois ou plus) qui contrarient les estimations sur la prévalence ou l’incidence. Cela se traduit surtout par l’impossibilité de mener une étude des trajectoires de soins ou de consommation médicale, car pour "suivre" un invididu, il convient avant tout de l’identifier. La réflexion sur le coût et la tarification des pathologies souffre aussi de ne disposer que de visions partielles.

L’exemple du PMSI est parlant. Il permet d’identifier et de dénombrer toutes les hospitalisations réalisées en France (court séjour). Ce système d’informations exhaustif, par delà ses finalités budgétaires, d’évaluation et de restructuration, est un outil épidémiologique intéressant.Toutefois, le PMSI ne permet pas pour l’instant de chaîner les informations. Les Résumés de Sortie Anonymes (RSA) résument la totalité du séjour du patient, mais il est impossible de lier entre eux ceux qui concernent un même patient. La base des RSA ne permet pas de savoir si deux séjours dans une même structure ou dans deux établissements différents "appartiennent" à un même patient. Il est impossible de reconstituer les trajectoires à l’intérieur du système hospitalier. Si le suivi des malades n’est pas nécessaire pour la plupart des pathologies aiguës, il est essentiel pour l’épidémiologie des pathologies chroniques, telles que les cancers, qui entraînent des prises en charge hospitalières itératives.

Le fonds du problème tient à la préservation de la confidentialité des données et du secret médical. Pour chaîner l’ensemble des données concernant un patient, il faut un « identifiant patient permanent » (IPP), c’est-à-dire un code propre à chaque patient, qui ne change pas, et qui permet de le "reconnaître", quel que soit le lieu et le moment de la prise en charge. Cet identifiant peut être créé de différentes façons. Le problème d’un tel identifiant est qu’il offre à toute personne qui le connaît la possibilité, en parcourant des bases de données médicales contenant des IPP, d’obtenir des informations de santé sur cette personne. La Commission Nationale Informatique et Libertés s’est ainsi opposée à ce que le numéro de sécurité sociale (Numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques, NIR, géré par l’INSEE), facilement connu par les proches d’un patient, puisse être utilisé comme IPP. La "dangerosité" de cet identifiant s’est d’ailleurs trouvée accrue lorsque l’Assemblée nationale a adopté en novembre 98 un amendement permettant à l’administration d’utiliser le NIR pour croiser les fichiers fiscaux et sociaux (lire "La confidentialité en toute transparence")

 Comment sont réalisées les études ?

Pour dénombrer des malades ou étudier les trajectoires de soins et les consommations, les études, suivant leurs objectifs et leurs moyens, partent de données existantes ou mettent en place des enquêtes ad hoc.

Partir des données existantes
  • Les études ad hoc intra établissement.

Il est possible de faire des études sur un établissement non plus à partir des RSA, mais des Résumés Standardisés de Sortie (RSS), qui ne sont pas anonymisés. Ceux-ci permettent de lier entre eux l’ensemble des séjours d’un même patient. L’autorisation de la CNIL, de la CME, des médecins concernés et des patients est nécessaire, ce qui rend le processus très lourd.

  • Le dénombrement de patients atteints d’une maladie à partir du PMSI.

Medcost et les journalistes de l’hebdomadaire Le Point ont par exemple exploité les bases PMSI pour étudier l’épidémiologie du mésotheliome en France (lire Deux exemples d’utilisation épidémiologique des bases PMSI : mésotheliome et mélanome Attention ! il s’agit d’un autre article de ce même magazine, rubrique SI hospitalier). Il a été nécessaire de "dédoublonner" les bases (identifier les hospitalisations qui appartiennent à un même patient) en faisant des hypothèses visant à attribuer plusieurs RSA à un même patient. Ce dédoublonnage est impossible à mettre en œuvre pour les bases médicamenteuses de médecine de ville, car  les données y sont agrégées, il n’y a pas une ligne par patient.

  • Les bases de la Sécurité sociale

Les caisses de sécurité sociale "chaînent" les informations de consommation/remboursement portant sur les assurés grâce au numéro de sécurité sociale (bases du SIAM, Système informationnel de l'assurance maladie). Dans son Rapport annuel au Parlement sur la Sécurité Sociale de septembre 1999, la Cour des Comptes écrivait que "le système SIAM fournit le lien entre assuré, praticien, acte et prescription et constitue, depuis le début des années 1990, le principal outil de gestion du risque de la branche maladie ".

Aujourd’hui, lorsque les réseaux de soins élaborent leur plan d’évaluation économique (évaluation du coût de la prise en charge), le suivi des consommations des patients joue un rôle important et fait concrètement appel aux bases de l’assurance maladie (lire par exemple l’interview de Robert Launois).

  • La dernière enquête décennale INSEE-IRDES

La dernière enquête décennale INSEE-IRDES ("Enquête nationale sur la santé et les soins médicaux") remonte à 1991-1992. Cette enquête qui portait sur 21 000 individus consistait à interroger un grand nombre de patients de manière approfondie. Ils décrivent les modalités de leur consommation (nombre de séances sur les trois dernières semaines, lieu de la séance, type de professionnel rencontré...), le financement des dépenses, les acquisitions de médicaments. L’enquête contient aussi la morbidité déclarée et certains indicateurs de santé. Par construction, l’information de base qui sort de cette enquête est "chaînée". A partir de ce matériau, différents types d’analyses peuvent être menées, par exemple des études de filières de soins en fonction de la maladie. Les statisticiens de l’INSEE ont par exemple établi qu’"au cours des quinze jours qui suivent le premier recours, un patient sur sept consulte à nouveau pour la même maladie. Mais rares sont ceux qui vont voir un spécialiste après avoir vu un généraliste en premier recours." (voir "Généraliste puis spécialiste : un parcours peu fréquent").

Mettre en place des enquêtes ad hoc

Les enquêtes ad hoc sur les trajectoires de soins à partir des dires de patients sont déclaratives : les patients rendent compte de leurs parcours en répondant à des questionnaires. Par exemple, l’URML Ile-de-France et le IRDES ont mené en 1999-2000 une étude sur "Les trajectoires des patients en Ile-de-France, l’accès aux plateaux techniques". Il apparaît notamment que le choix de l’établissement ou du praticien hospitalier que font les patients est influencé, pour plus de la moitié d’entre eux, par le médecin prescripteur.

Les enquêtes ad hoc à partir de données recueillies par les professionnels permettent de concentrer facilement toute l’information médicale et de consommation de soins concernant certains patients, il est possible de demander aux professionnels de santé qui les prennent en charge de recueillir les données sous un "IPP". Ce recueil de données se fait en routine sur une zone déterminée, pendant la durée de l’enquête. La CNIL doit donner son accord. Deux systèmes sont concevables : les données d’un même patient sont regroupées sous un numéro pour lequel on peut faire la "correspondance" avec l’identité du patient (la "table de correspondance" doit alors être protégée de manière rigoureuse, un responsable est désigné) ; les données du patient sont automatiquement dotées d’un IPP, et il est impossible de revenir de cet IPP à l’identité du patient. Des logiciel de "hachage asymétrique" permettent, à partir de caractéristiques du patient (âge, sexe, nom...) de générer un tel identifiant. Le DIM du CHU Dijon a ainsi mis au point le logiciel Anonymat dont l’utilisation a été approuvée dans un certain nombre d’enquêtes par la CNIL.

Ces méthodes ont un inconvénient : elles ne portent que sur des échantillons, par opposition aux informations issues du PMSI qui est exhaustif (sur la France entière, sur une région, un département, un établissement). D’où l’intérêt de mettre en place des RSA chaînables.

 PMSI : la mise en œuvre des RSA chaînables

La mise en œuvre du RSAc (Résumé de Sortie Anomymisé chaînable) devrait fournir prochainement des informations précieuses sur les pathologies nécessitant une prise en charge hospitalière. Ceci permettra aux épidémiologistes de ne plus se limiter seulement à une vision "séjour", mais de bénéficier aussi d’une vision "patient" ou "pathologie". En effet, le CTIP (Centre de traitement de l'information du PMSI) a élaboré une méthode de chaînage des RSA (voir Interview de Max Bensadon) qui autorise le suivi des patients hospitalisés à partir des données PMSI et qui est en voie de généralisation.

Un numéro dit d’anonymisation permet le chaînage. Il est créé grâce à partir de variables identifiantes : numéro de sécurité sociale, date de naissance du patient, sexe. (voir Interview de Max Bensadon) Le projet est de couvrir, à terme, tout le secteur hospitalier concerné par le PMSI. Le lien avec le moyen séjour et la psychiatrie sera possible quand le PMSI y sera généralisé. En revanche, le lien avec le long séjour n’est pas possible puisque le numéro de sécurité sociale n’y est pas recueilli systématiquement. La jonction avec les données de ville ne posera pas problème technique, puisque la sécurité sociale utilise par définition le NIR pour ses remboursements. D’autre part, comme le numéro est créé de façon identique à partir d’éléments immuables, le suivi pourra se faire sur plusieurs années.

Le problème du chaînage semble avoir trouvé ici sa solution. Toutefois, la mise en place d’un chaînage généralisé devrait être progressive. Surtout, les informations chaînées autorisent des recoupement plus faciles et peuvent menacer la confidentialité des données de santé. La CNIL regardera de près leur diffusion. Difficile de dire aujourd’hui le degré de précision des données qui seront confiées aux épidémiologistes.


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