Le
coût par pathologie :
mythe ou réalité ?
Eclairages
LOI no 99-641 du 27 juillet 1999 portant création
d'une couverture maladie universelle (source
: JO)
Article 55
L'article L. 716-2
du code de la santé publique est ainsi rédigé :
Art. L. 716-2. - Le
Gouvernement pourra expérimenter, à compter du 1er janvier 2000,
et pour une période n'excédant pas cinq ans, de nouveaux modes de
financement des établissements de santé publics ou privés, fondés
sur une tarification à la pathologie.
Les expériences pourront
être menées dans une zone géographique déterminée, pour tous les
établissements de santé de la zone ou pour une partie d'entre eux,
selon les modalités définies par voie réglementaire.
Les dépenses mises
à la charge de l'ensemble des régimes obligatoires de base d'assurance
maladie qui résultent de ces expériences sont prises en compte dans
l'objectif national de dépenses d'assurance maladie visé au 4o du
I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale.
Les
différentes utilisations possibles du coût par pathologie
Le
coût par pathologie peut être utilisé dans différentes perspectives
:
- Pour comparer
les stratégies thérapeutiques
Il a été beaucoup utilisé
dans ce cadre par l'industrie pharmaceutique. Prouver l'intérêt
d'un nouveau traitement par rapport à un produit de référence peut
se faire soit en démontrant qu'il est plus efficace, soit qu'à efficacité
équivalente il engendre moins de dépenses de santé pour la société.
Cette dernière approche nécessite la réalisation d'études médico-économiques,
faisant le bilan de l'ensemble des coûts générés par les différentes
thérapeutiques.
- Dans le
domaine de la planification
La détermination des
priorités sanitaires requiert une connaissance du coût réel de l'exécution
d'un programme sanitaire. Les pouvoirs publics utilisent par exemple
les méthodes de rationalisation budgétaire, qui nécessitent d'étudier
le rapport coût-avantage d'une intervention de santé.
- Pour évaluer
la qualité des soins
C'est également un
domaine d'application. Porter un jugement de valeur sur une action
de santé nécessite, entre autres, d'estimer l'utilisation des budgets
alloués à cette action.
- Dans le
cadre de l'allocation budgétaire
Enfin, et surtout,
la tarification à la pathologie est une des approches utilisable
par les pouvoirs publics pour répartir les enveloppes consacrées
à la santé. La méthode semble sérieusement envisagée en France pour
les établissements publics et privés.
Les
DRG (Diagnosis Related Groups) et le PMSI (Programme
de Médicalisation du Système d'Information)
Le principe de la tarification
par pathologie à l'hôpital est simple : l'établissement reçoit un
budget proportionnel à l'activité qu'il a effectivement réalisée.
C'est d'abord aux Etats-Unis
que le principe a été appliqué. Le système des DRG (Diagnosis Related
Group), système de classification des séjours élaboré par l'équipe
de Fetter à l'université de Yale, a permis de mettre en relation
les pathologies traitées à l'hôpital et leurs modes de traitement
avec les coûts correspondants.
Les DRG ont été progressivement
utilisés dans d'autres pays. En France ils ont été adaptés pour
devenir les GHM (Groupes Homogènes de Malades). Ainsi, dans le cadre
du PMSI (Programme de Médicalisation du Système d'Information),
chaque séjour de chaque patient donne lieu à un recueil de données
standardisées, données administratives, actes et diagnostics. Un
algorithme de groupage permet de classer le séjour dans un GHM,
indicateur médico-économique regroupant des séjours ayant mobilisé
des ressources de même ampleur. Un groupe homogène de malade est
valorisé en points ISA (Indice Synthétique d'Activité), qui représentent
un coût théorique du séjour en francs. Il faut ensuite multiplier
le nombre de points ISA d'un GHM par la valeur en francs du point
ISA pour connaître le coût théorique d'un séjour.
Par exemple, l'échelle
de coûts 99 des établissements publics indique que la valorisation
du GHM 540, accouchement par voie basse sans complication, est de
1 000 points ISA. Si la valeur du point régional, déterminée en
fonction de l'enveloppe régionale et de l'activité des établissements
de la région, est de 12 francs, un établissement ayant "produit"
un séjour classé dans le GHM 540 devrait théoriquement recevoir
un budget de 12 000 francs.Les
HRG (Health Resource Groups), adaptation anglaise des DRG, sont
utilisés en Angleterre dans le cadre des négociations et des contrats
passés entre acheteurs et fournisseurs de soins. Les DRG sont également
utilisés au Portugal, en Belgique, en Suisse, en Italie. L'Allemagne
en revanche a opté pour l'utilisation des Patient Management Categories,
classification basée sur le motif d'entrée, les diagnostics et les
décisions thérapeutiques.
L'approche globale : lexemple anglais
Le NHS
(National Health Service), système de santé anglais, repose sur
le principe de la fongibilité des enveloppes, au contraire du système
français dans lequel les enveloppes budgétaires de la médecine libérale
et de l'hôpital sont strictement séparées (Cliquez ici
pour en savoir plus sur le NHS).
Les médecins généralistes
en Grande Bretagne sont la porte d'entrée dans le système de soins
et ils sont rémunérés à la capitation. L'introduction du quasi marché
dans le NHS dans les années 90 a introduit le principe d'une multiplicité
de payeurs, pour les soins hospitaliers ou de ville. Les fundholders,
cabinet de groupe, gèrent une partie des fonds destinés aux hôpitaux.
L'enveloppe est déterminé en fonction de l'âge, du sexe et de la
morbidité des patients, il s'agit donc bien d'une tarification à
la pathologie ;
En décembre 97 le livre
blanc de la santé du parti travailliste a réformé le système, tout
en conservant le principe des enveloppes fongibles. Le système prévoit
l'émergence progressive des Primary Care Groups
(PCG). Les médecins généralistes sont à présent obligés d'appartenir
à un PCG, qui gère des budgets pour l'achat de soins ambulatoires
et aigus, et couvre donc tous les services de soins primaires. Les
PCG sont responsables de la santé des populations concernées, doivent
développer les soins primaires et négocier les soins secondaires.
Cette approche a le
grand avantage d'encourager la prévention. Le médecin chargé d'un
patient a tout intérêt à prévenir la survenue de complications en
dispensant des conseils sanitaire ou en mettant en uvre des
traitements peu coûteux, plutôt que de mettre en route des soins
onéreux ou d'hospitaliser le patient lors de la survenue de problèmes.
Dans ce schéma, les
médecins généralistes veillent strictement à l'allocation optimale
des ressources, ce qui maximise en principe le rapport coût efficacité.
Par ailleurs l'intérêt théorique de la fongibilité des enveloppes
est de permettre le redéploiement des moyens de la médecine hospitalière
vers la médecine ambulatoire, ce que ne permet pas le système français.
La configuration anglaise
s'inspire de l'expérience américaine des Health Maintenance
Organizations (HMO), systèmes intégrés d'assurance maladie
qui fournissent à leurs adhérents des prestations médicales sur
un mode globalisé. La cotisation à l'organisation est indépendante
du recours aux services. Cependant cette approche est actuellement
violemment critiquée, les HMO voulant avant tout maximiser leurs
bénéfices et cherchant à décourager le patient d'avoir recours à
des services. L'accès aux soins est ainsi rendu difficile par une
accumulation d'obstacles de nature administrative.
5 octobre 1999
|