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Colloque des économistes
de la santé

Le réseau en santé,
un " Objet Collectif Non Identifié "

Maryse GADREAU,
GRES/LATEC, CNRS,
Université de Bourgogne

Maryse GADREAU offre une présentation du réseau en santé en l’abordant sous deux angles :

  • le réseau " d’allocation de ressources ", où les échanges sont gérés dans une logique de répartition optimale,
  • le réseau de " création de ressources ", où la coordination est envisagée comme un problème d’organisation de la production.

Puis l’auteur tente de repérer ces formes théoriques au sein de la réforme du système de santé en France, pour tenter de formuler des recommandations destinées à organiser de façon cohérente le système de santé en réseau.

Deux approches des réseaux

Le réseau dans la réforme du système de santé

Trois conditions pour une organisation en réseau cohérente du système de santé

Conclusion


Deux approches des réseaux

L’auteur aborde le réseau à partir de deux conceptions théoriques :

  • l’économie d’allocation de ressources, où la coordination est considérée comme une organisation de l’échange
  • l’économie de création de ressources, où la coordination est envisagée comme un problème d’organisation de la production.

Le réseau d’allocations de ressources organise l’échange

L’approche des " coûts de transaction " et la théorie industrielle des réseaux d’infrastructure se confortent et se complètent :

- l’approche des " coûts de transaction " est dérivée des travaux de Williamson (1975).

Le réseau est un mode de coordination entre le marché et hiérarchie, avec l’emprunt des mécanismes contractuels à l’un et des dispositifs contraignants à l’autre. Pour Williamson, plus un actif est spécifique, plus il sera difficile de le reconvertir et donc plus les partenaires auront intérêt à figer leurs relations sous une forme hiérarchique. A l’inverse une faible spécificité permet une grande souplesse et facilite une coordination par le marché. Le temps ayant, par ailleurs tendance à renforcer la spécificité des actifs.

- la théorie industrielle des réseaux d’infrastructure

Aux différents couches du réseau technico-économique (inférieure, centrale, supérieure) correspondent des modes de coordination différents. Elles correspondent en économie industrielle aux coûts fixes ou aux coûts irrécupérables.

Ces deux approches peuvent conduire à décomposer l’organisation en réseau en trois niveaux relevant d’une intégration plus ou moins forte selon la spécificité des actifs ou l’existence de coûts irrécupérables :

  • Le niveau inférieur

C’est l’infrastructure, autrement dit les plateaux techniques hospitaliers et les compétences nécessaires à leur utilisation, qui sont difficiles à reconvertir à moindre coût.

  • Le niveau  central

C’est le contrôle et la gestion de l’infrastructure. Il est fonction de la nature des services logistiques et de leur interdépendance plus ou moins forte avec les niveaux inférieurs et supérieurs.

  • Le niveau supérieur

C’est la commercialisation des services, il concerne la production de services médicaux et paramédicaux, en prise directe avec l’usager.

Le réseau de santé oscille donc entre intégration et désintégration, entre stabilité et flexibilité. Il se situe en quelque sorte entre le marché et le plan.

Mais les " prédictions " de Williamson, qui veulent que les réseaux prennent une forme de plus en plus intégrée, c’est-à-dire de plus en plus hiérarchisée, (les actifs devenant de plus en plus spécifiques lorsqu’une organisation se pérennise), ne se sont pour l’instant pas vérifiées. En effet les Etats-Unis offrent l’exemple des réseaux de soins coordonnés, initialement fortement intégrés avec des réseaux fermés (type HMO) qui évoluent vers des formes plus souples (type PPO ou POS) avec le temps.

Le réseau de création de ressources crée les "inputs " nécessaires

La coordination au sein d’un réseau est créatrice de ressources grâce aux synergies qui se créent entre acteurs : échanges, émulation, apprentissages mutuels. Ceux-ci se développent dans le cadre de formations communes et transversales entre professionnels de santé et intervenants de la sphère sociale et administrative. Cette coordination permet de définir des lignes directrices de soins, de diffuser de nouvelles méthodes de formations… En un mot, c’est l’effet de groupe qui est créateur.

Deux approches théoriques peuvent en rendre compte :

  • l’approche " conventionnaliste " : en période d’incertitude les conventions favorisent le consensus en imposant des repères extérieurs
  • l’approche " évolutionniste " : les comportements des partenaires créent des ressources et favorisent un apprentissage mutuel. Il existe cependant une interrogation sur le poids respectif à accorder dans les phases de changement aux démarches volontaristes et aux processus auto émergents.

Le réseau dans la réforme du système de santé

L’auteur s’efforce de distinguer au sein de la réforme du système de santé, les formes institutionnelles de réseau qu’elle a décrites.

Elle constate qu’aucune des ordonnances relatives à l’hospitalisation publique et privée ou à la médecine de ville ne donne une définition claire des notions de " filière " et de " réseau ". Si ce n’est que dans une filière, le médecin contrôle l’accès du patient de façon très hiérarchique, tandis que l’accès au réseau peut se faire de toutes parts.

Réseaux inter et extra hospitaliers

L’expérimentation des réseaux s’inscrit dans le contexte de la régionalisation avec la création des ARH et les SROS, la contractualisation avec les Contrats d’Objectifs et de Moyens, et l’accréditation sous l’égide de l’ANAES.

Les SROS, développés dans le cadre des missions des ARH, recherchent l’efficacité, la qualité, l’accessibilité. Les ARH tentent donc de convaincre les autorités locales de l’opportunité d’une recomposition hospitalière en réseaux pour redéployer les personnels et les matériels des établissements de petites tailles recevant trop peu de patients. Le redéploiement en réseau des personnels et matériels est assimilable à un processus de désintégration-intégration qui vise à améliorer le rapport efficacité-accessibilité.

Dans cette perspective, le Contrat d’Objectifs et de Moyens est un instrument de négociation idéal pour promouvoir la coopération inter hospitalière (entre établissements) et extra hospitalière (ville-hôpital).

L’ordonnance hospitalière encourage les réseaux inter hospitaliers à coopérer. La communauté d’établissement est une obligation pour les établissements publics et une forte recommandation pour les privés. Elle reconnaît le réseau extra hospitalier comme étant une nouvelle façon d’organiser les soins de façon concertée entre tous les acteurs.

Elle est complétée par l’ordonnance sur la médecine de ville qui offre la possibilité d’expérimenter de nouvelles formes d’organisations des soins pour une prise en charge globale des patients atteints de pathologies lourdes ou chroniques.

La comparaison de différentes expérimentations qui ont eu lieu en Bourgogne a montré que les réseaux qui fonctionnent et qui durent, ont une forme institutionnalisée par des contrats et des contraintes, et sont organisés autour d’un objectif commun qui correspond à la forme conventionnaliste du réseau de création de ressources. Dans le même temps il convient d’éviter une institutionnalisation trop poussée qui ne peut pallier l’absence d’implantation locale.

En somme, un " réseau idéal " repose sur la combinaison de contraintes, de contrats et de conventions dans des proportions qu’il est difficile de déterminer, chaque réseau ayant sa spécificité.

La filière de soins institutionnalise la relation patient-médecin

Dans les années 90 apparaît l’idée du médecin référent, sorte de gatekeeper, où un médecin généraliste, coordonnateur de soins, éviterait le recours direct aux spécialistes, le nomadisme médical, et favoriserait la gestion du parcours du patient dans le système de soins.

Le patient passe avec le praticien un " contrat de santé ", qui le dispense de l’avance de frais en échange de l’obligation de consulter en première intention ce médecin. Les relations entre médecin et patient s’institutionnalisent et la coordination devient effective. Le médecin référent s’inscrit donc dans une dimension " conventionnaliste ".

La dimension " évolutionniste " est quant à elle visible dans les apprentissages mutuels qui naissent du climat de confiance créé par la stabilisation des relations entre médecin et patient. Ceci devrait permettre de créer en conséquence une régulation spontanée de la pratique médicale et des exigences des patients.

En ce sens Maryse Gadreau se demande si le médecin référent ne pourrait pas être le précurseur d’une organisation en réseau hiérarchisé du système de santé. Il utilise en effet le contrat, la contrainte et la convention.

Trois conditions pour une organisation en réseau cohérente du système de santé.

Un cadre institutionnel général

Le réseau hésite entre plusieurs cadres institutionnels :

  • intra hospitalier entre établissements, mono ou polypathologies
  • extra hospitalier, organisé autour de l’hôpital pour les pathologies lourdes
  • ville-hôpital autour du généraliste pour diminuer le recours à l’hôpital
  • la filière
  • le réseau de soins coordonnés qui fédère l’ensemble des professionnels d’un bassin de vie.

Il faudrait légiférer directement sur les réseaux et non par le biais de la médecine de ville ou de l’hospitalisation. Mais le contexte " politique " est difficile entre l’Etat qui défend ses prérogatives sur l’hôpital et l’Assurance maladie qui ne peut intervenir que sur la médecine de ville. Mais il faut également éviter l’écueil d’une institutionnalisation forcée qui serait contraire à la nature du réseau.

Un financement globalisé et transversal

C’est une condition indispensable pour réaliser l’efficacité productive du réseau. L’opérateur sera un acheteur avisé qui utilisera au mieux les moyens qui lui sont alloués (allocation de ressources). C’est un contrat de type " prix fixe ", indépendant du nombre d’actes effectués, il permet de réguler le niveau d’activité du médecin en déconnectant sa rémunération de son activité en terme de volume.

Cependant si ce financement global encourage la " juste activité ", il ne garantit pas la qualité de cette activité. Selon l’auteur le médecin pourrait être tenté d’adopter un comportement de sélection adverse, c’est-à-dire qu’il pourrait sélectionner les patients les plus faciles à soigner ou ne pas soigner correctement les patients " tout venants " pris en charge.

Il faut donc que ces nouvelles modalités de financement s’accompagnent de l’élaboration et l’application d’une procédure d’évaluation et d’accréditation garantissant la qualité des soins.

Monopole public ou délégation de gestion privée ?

Le monopole public centralisé de financement fait l’objet de critiques au sujet de son inefficacité productive supposée. Cependant l’introduction d’une mise en concurrence avec le privé, supposée être garante d’une plus grande efficience n’est pas à l’ordre du jour en France.

Nombre de projets émergent, où des assureurs privé obtiendraient une sorte de délégation de service public et prendraient en charge des clients moyennant un forfait attribué par l’Assurance maladie sur la base d’un coût actuariel de la prise en charge de ce patient. L’assurance jouerait alors le rôle d’un acheteur de soins en vue d’améliorer l’efficacité productive.

Aux Pays-Bas, l’expérience tend à démontrer que, malgré l’introduction de la concurrence, le coût des soins n’a pas diminué et qu’en outre l’équité dans l’accès aux soins peut être mise à mal.

Conclusion

Le monopole public de financement et de gestion de l’Assurance maladie pourrait être déconcentré géographiquement donnant davantage d’autonomie à l’échelon local pour adopter ses propres règles de gestion et de rémunération des producteurs.

La politique de régionalisation avec les ARH et les URCAM en sont peut-être les prémisses. Le HCSP a élaboré un scénario en ce sens où une instance régionale unique recevrait une allocation globale en fonction des besoins de santé régionaux.

Le choix entre ces alternatives se fera selon la capacité de chacune à garantir à efficacité productive égale la meilleur égalité d’accès aux soins. Les dimensions d’allocations de ressources et de création de ressources étant indissociables.

7 mars 2000

 

 


 

 
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